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mardi 28 février 2012

La compétitivité ne passe pas que par la TVA sociale

(Nouvelle lecture du Projet de loi de finances rectificative pour 2012)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il y a, il faut le dire, quelque chose de surréaliste dans la discussion de ce collectif budgétaire.

Notre pays a accumulé en l’espace de quelques années, depuis 2007, près de 500 milliards de déficit et de dette supplémentaires, pour une part – c’est vrai – en raison de la crise, mais, pour une part plus large encore, en raison des décisions gouvernementales, tant en matière de dépenses que de recettes.

Or ce que vous nous proposez, madame la ministre, ce ne sont pas les conditions d’une réduction des déficits, c’est un transfert de 13,5 milliards des entreprises vers les ménages, au nom d’une amélioration de compétitivité qui est tout sauf démontrée.

- D’abord parce que ce dispositif ne concernera que marginalement le secteur le plus exposé à la concurrence internationale.

- Ensuite parce que le taux de transfert rapporté au poids des charges ne changera pas sérieusement la donne en matière de concurrence.

- Enfin parce que vous allez toucher avant tout le pouvoir d’achat des catégories les plus modestes.

D’autres voies méritaient à l’évidence d’être explorées.

- La question de la fiscalisation des charges familiales est posée depuis longtemps mais, s’agissant d’une redistribution entre les ménages en faveur des familles et des enfants, la logique voudrait que l’on agisse d’abord par la voie de l’impôt sur le revenu des personnes physiques, que ce soit par l’institution de nouvelles tranches sur le barème de l’IRPP, ou par l’égalisation de traitement des revenus du travail et des revenus du capital.

- Autre voie : une meilleure répartition de la charge de l’impôt sur les sociétés entre des grands groupes qui tirent abusivement parti du bénéfice mondial consolidé et des PME qui sont seules imposées au taux réel.

M. Christian Eckert. Absolument !

M. Daniel Garrigue. Le prélèvement exceptionnel que vous avez institué sur les grands groupes est largement illusoire puisqu’il s’applique pour l’essentiel à assiette inchangée.

M. Jean Launay. C’est M. Garrigue qui le dit et il a raison !

M. Daniel Garrigue. Comment prétendre améliorer la compétitivité si la persistance des déficits et de la dette rendent chaque jour plus difficile le financement et l’accès au crédit des entreprises ? Or c’est là un facteur essentiel de développement des entreprises.

Comment prétendre améliorer la compétitivité si rien n’est entrepris à l’échelle européenne pour favoriser un minimum de croissance ? En présence d’États confrontés à la nécessaire remise en ordre de leurs finances publiques, seules des initiatives européennes peuvent apporter des perspectives de reprise qui ne viendront pas d’elles-mêmes.

Vous avez raison, madame la ministre, de souligner que le mécanisme européen de solidarité est l’expression d’une solidarité européenne nécessaire, même si elle est malheureusement tardive. Mais vous avez tort de ne pas chercher à étendre cette démarche de solidarité aux instruments qui permettraient de retrouver plus d’activité au sein de la zone euro et de l’Union européenne.

Comment, enfin, prétendre s’inspirer du modèle allemand sans aller au fond des réalités ? La différence entre la France et l’Allemagne n’est pas qu’une affaire de TVA. Elle réside dans une démarche stratégique alliant les grands groupes et les PME, dans la primauté donnée à la formation professionnelle et pas seulement au stade de l’apprentissage, dans l’intégration production-recherche-formation, dans une relation entre partenaires sociaux qui s’est forgée avec l’expérience de la cogestion.

Or, depuis cinq ans, pendant lesquels vous avez laissé se creuser des écarts de rémunérations sans précédent dans l’entreprise, qu’avez-vous fait pour développer l’association, la participation ou la contractualisation dans l’entreprise ou dans les branches industrielles ? C’est pourtant par cette voie, et par cette voie seulement, que vous découvrez en catastrophe, aujourd’hui, avec les procédures compétitivité-emploi, que l’on peut travailler durablement à l’équilibre entre activité et compétitivité des entreprises d’un côté, sécurité et pouvoir d’achat des salariés de l’autre.

Pas plus que la loi de finances, ce projet de collectif n’apporte de réponse sérieuse à la dérive de nos finances et à l’affaiblissement de notre économie.

En conséquence, je m’y opposerai.

Mme Valérie Pécresse, ministre. […] Le rapporteur général l’a rappelé, les salariés et les entreprises attendent cette réforme du financement de la protection sociale, dans le secteur de l’industrie, dans l’agriculture et dans tous les autres secteurs. À cet égard, je déplore la position exprimée par Daniel Garrigue et par M. Rodet. La baisse des charges, c’est permettre aux entreprises de remporter des marchés, d’investir, de se développer, de recruter et, à terme, de redistribuer les fruits de leur croissance. C’est aussi favoriser la relocalisation d’entreprises, au contraire de certaines propositions que nous entendons en ce moment, lesquelles conduiraient à décourager l’investissement dans notre pays.

Posté par Daniel GARRIGUE à 12:25 PM
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