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mardi 11 janvier 2011

Daniel GARRIGUE écrit à Alain Juppé au sujet de l’ESCAT, de Bergerac NC et d’Eurenco Bergerac

Monsieur le Ministre,

J'ai l'honneur d'attirer votre attention sur les conséquences de la loi de programmation militaire 2009-2014 et des nouvelles orientations de la stratégie de défense et de sécurité nationale pour la ville de Bergerac.
Bergerac disposait en effet jusqu'à présent de trois établissements relevant directement ou indirectement du ministère de la Défense.

  • Un des deux établissements spécialisés du Commissariat à l'Armée de Terre (ESCAT) comptant une centaine d'agents militaires et civils
  • Plusieurs sociétés ou établissements relevant du groupe SNPE, et particulièrement :
    - La société Bergerac-NC, spécialisée dans la production de nitro-cellulose (150 salariés).
    - La société Eurenco, entreprise d'armement spécialisée dans la production de charges modulaires (munitions) (120 salariés).

Or, les dispositions prévues par la loi de programmation militaire ont pour conséquence la disparition de deux de ces établissements ou sociétés. Les perspectives du troisième restent elles-mêmes incertaines.

1- L'établissement spécialisé du Commissariat de l'Armée de Terre (ESCAT) de Bergerac.

Dans le cadre de la réorganisation de la logistique des Armées, la fermeture de cet établissement a été prévue pour 2014.
Plusieurs interrogations demeurent. D'abord, la mise en oeuvre de la nouvelle organisation logistique autour des bases de défense – ou autour de l'établissement de Chatres sera-t-elle réellement opérationnelle en 2014 ? D'autre part, la mise en oeuvre anticipée du plan d'aide aux restructurations (PAR), si elle permet à certains personnels de se réorienter, permettra-t-elle de maintenir l'effectif à un niveau suffisant jusqu'en 2014 pour que ceux des personnels qui ont fait le choix d'aller jusqu'à cette date, puissent effectivement le faire ?
D'autre part, des études ont été financées pour préparer le reconversion ou la revitalisation du site. Le montant des crédits prévus au titre du plan local de redynamisation (PLR), soit 1,5 million d'euros, paraît toutefois d'une portée beaucoup trop limitée pour espérer reconstituer la centaine d'emplois perdus, même si les autres collectivités s'engagent pour un montant équivalent.

2- La société Bergerac NC :

La privatisation prévue par la loi de programmation militaire a transformé le groupe SNPE en une véritable structure de défaisance.
C'est dans ce cadre qu'a été prévue la fermeture au 31 mars 2011 de la société Bergerac NC. Une partie de l'activité serait reprise par le groupe espagnol Maxam, ce qui devrait assurer le maintien de l'activité de 28 salariés.
Le plan social qui correspond à la suppression de 108 emplois apporte certes des solutions aux salariés concernés. 53 d'entre eux devraient bénéficier des éléments combinés du dispositif amiante et d'un congé de mobilité. 21 seraient repris par d'autres filiales locales de la SNPE. Les 34 salariés restants se verraient proposer des mutations dans différentes unités du groupe – notamment à l'usine de Sorgues, dans le Vaucluse, avec différentes mesures d'accompagnement.
Il n'empêche que la disparition d'une centaine d'emplois aura un impact lourd sur une économie locale où le taux de chômage a déjà sensiblement progressé. La préfète de la Dordogne, Madame Abollivier, et ses services, souhaitent qu'une convention de revitalisation soit demandée à la SNPE.
Je ne peux que m'associer très fortement à cette demande, à laquelle le groupe SNPE devrait être en mesure de répondre, puisque la cession de différentes unités – dont la cession de SME à Safran – devrait procurer au groupe résiduel des ressources financières importantes.
Au delà, il paraît important d'accélérer la revitalisation du site. Des crédits du FRED ne devraient-ils pas être prévus à cet effet ?

3- Eurenco

La société Eurenco représente le métier d'origine de la SNPE. Après une alliance peu concluante avec les Suédois (SAAB) et les Finlandais (PATRIA), ses principales activités se répartissent entre les sites de Bergerac (les charges modulaires, ou enveloppes combustibles des munitions) et de Sorgues (explosifs) ainsi que dans la filiale PB Clermont (poudres).
Ces activités, qui sont étroitement liées aux commandes du ministère de la Défense et aux exportations d'armement, sont depuis longtemps déficitaires. Elles n'en représentent pas moins un fort enjeu stratégique, souligné par le livre blanc sur la Défense.
Compte tenu du démantèlement programmé du groupe SNPE, et de l'absence d'intérêt du groupe Safran pour ces activités, leur avenir est lié à une reprise ou à une alliance avec d'autres entreprises du secteur. Il semble aujourd'hui que la solution la plus fortement envisagée serait un rapprochement avec Nitrochemie, filiale du groupe allemand Rheinmetall.
Dans ce contexte d'ensemble, trois sujets d'inquiétude pèsent sur le devenir du site de Bergerac :

1. D'abord, la cession des terrains sur lesquels se situe Eurenco au groupe espagnol Maxam s'accompagne d'une augmentation du loyer dû par Eurenco de 80 000€ à 350 000€, ce qui ne peut que fragiliser davantage les résultats de l'établissement.
2. Ensuite, le plan de charge d'Eurenco-Bergerac est avant tout fonction des commandes de l'Etat. Selon le programme à moyen terme (PMT) 2010-2013, ces commandes devraient être régulièrement assurées. Mais qu'en sera-t-il réellement pour 2011 et pour les années à venir, compte tenu des réductions de moyens du budget de la Défense ? Les commandes prévues seront-elles effectivement lancées et à quel niveau ?
3. Dans le rapprochement apparemment prévu avec Nitrochemie, l'établissement de Sorgues paraît à priori en situation favorable - compte tenu des importants investissements liés au projet Phénix (explosifs composites) qui n'ont pas d'équivalent côté allemand – alors que l'établissement de Bergerac risque de se trouver en concurrence avec l'établissement allemand d'Aschau sur les charges modulaires.

Pour toutes ces raisons, les salariés de l'entreprise et l'ensemble du Bergeracois souhaiteraient savoir clairement quelles sont les orientations du ministère de la Défense à l'égard d'Eurenco-Bergerac.
Je vous serais très reconnaissant de bien vouloir apporter des réponses à ces différentes questions qui sont pour nous primordiales.

Veuillez croire, Monsieur le Ministre, en l'expression de ma haute considération.

Daniel GARRIGUE